QUAND L’EX CHAUFFEUR DE TAXI FINIT SA COURSE EN CIRCUIT COURT...
Dernière mise à jour : 16 févr. 2021
Sylvain Noilou à 33 ans. Il est aujourd’hui maraîcher à Pressigny-Les-Pins. Par choix. Et il en est heureux. L’été il peut travailler 70 heures par semaines sur son exploitation. Et ça ne change rien : il est toujours heureux de son choix de vie.
Il nous explique pourquoi.
« J’ai passé une grande partie de mon enfance à Châtillon-Coligny. À 18 ans, après le lycée en forêt je suis parti à Tours et je ne revenais que très rarement dans le Gâtinais. Je m’y ennuyait. Quant à la nature, d’une certaine manière je ne la voyais pas. J’ai vécu mon adolescence à la campagne sans m’y intéresser. Et j’avais le sentiment que personne ne s’en préoccupait. D’ailleurs, les fils d’agriculteur n’étaient pas plus proche de la nature que moi. Mais ça, je ne m’en suis rendu compte que bien plus tard…
À Tours, j’ai fait des études de gestion, j’ai fait des petits boulots, et je suis devenu taxi. Pendant 8 ans. À la fin je faisais beaucoup de transports de personnes malade ou qui nécessitaient une assistance. J’aimais mon métier et le relationnel que cela impliquait. Et puis il y a eu un changement. C’est difficile à expliquer. J’ai eu une prise de conscience écologique. Je me suis rendu compte de tout ce que l’on détruisait dans les jardins, que ce soit les insectes ou les champignons. Je découvre alors le mouvement des néo-ruraux, ces citadins qui ont un tel besoin de nature qu’ils décident de changer de vie en s’installant à la campagne. Je me sens proche d’eux alors que j’ai été élevé à Châtillon-Coligny ! Je réalise que je suis passé à côté de quelque chose.
Je décide alors de me rapprocher de ma famille. J’arrête le taxi, je veux vivre dehors, dans la nature. Je commence à faire mon jardin. Sur internet je découvre les méthodes de permaculture et je suis convaincu de ces méthodes ou l’homme cultive la terre en symbiose avec le vivant qui y habite. Mais pour moi tout ça est sans issue. Je n’ai pas de terre, je ne suis pas du milieu agricole, c’est donc impossible, impensable.
Et puis j’ai commencé à faire un projet. Une association qui soutient l’installation des petites fermes m’a accompagné et proposé une formation « de l’idée au projet ». J’ai rencontré des maraîchers. Ça m’a motivé et j’ai fini par passer le BPREA, le Brevet Professionnel Responsable d'exploitation agricole en productions animales ou horticoles. J’avais le sésame mais pour moi rien n’était gagné. Comment trouver du foncier ?
Des amis à Pressigny-Les-Pins ont parlé de mon projet. J’ai rencontré Mme le Maire, Mme Garnier. Et j’ai eu de la chance. Une parcelle de « prairie depuis toujours » était à vendre depuis quinze jours. 1,5 hectares de prairie, et une maison en ruine. Le tout à vendre 45000 euros. Je me suis décidé. J’ai investi 50000 euros supplémentaires pour rendre la maison habitable. Pour mon exploitation j’ai obtenu des aides financières de la région, de l’Europe et du département. 18000 euros. Mais il y a une condition : d’ici cinq ans je dois être en mesure de me dégager un smic, sinon je dois rembourser. L’urgence a été de faire un forage pour disposer d’eau sur le site. Le coût : 10000 euros. Mais c’est indispensable.
Mon installation officielle date de février 2018. L’année dernière je n’étais pas encore complètement opérationnel. Cette année ça va être le vrai départ de mon activité. J’ai choisi de travailler au maximum en circuit court. Mes clients viennent me voir les samedi matins, je livre à une AMAP située à quelques kilomètres chaque semaine, et je livre à la demande l’épicerie du village. C’est ce que je voulais faire : de la vente directe, au contact des gens. Ma vie me plait. Beaucoup de personnes considèrent que j’ai fait beaucoup de sacrifices. C’est les autres qui le disent, moi j’en ai pas l’impression.