MARIUS TRÉSOR / JEAN-PIERRE ADAMS : « JE PORTE ENCORE LE CHOC SUR MOI »

Jean-Pierre Adams – Marius Trésor. Deux joueurs, une histoire. « La garde noire » en équipe de France, dans les années 70, c’étaient eux. Une charnière centrale digne de ce nom. Une vraie muraille. La légende a duré quatre ans. Marius Trésor n’a jamais revu Jean-Pierre Adams depuis son accident, le 17 mars 1982. Pas par négligence ni par manque de temps. Mais la décision de Marius est mûrement réfléchie. « Je veux garder l’image que j’avais de lui », explique Marius Trésor. L’ancien libéro des Bleus, passé par l’AC Ajaccio, l’Olympique de Marseille et les Girondins de Bordeaux, 69 ans aujourd’hui, exprime sa profonde tristesse au sujet de son « ami » Jean-Pierre Adams. Nous l’avons contacté. Il a accepté de se confier. Exclusivité.
Marius, trente-sept ans après la terrible erreur médicale subie par Jean-Pierre Adams, que ressentez-vous aujourd’hui ?
Que voulez-vous que je vous dise (il soupire). Je suis abattu. C’est injuste. Je n’arrive toujours pas à comprendre ce que s’est-il passé. C’est terrible ! Jean-Pierre me manque. Il ne méritait pas ce sort. On lui a arraché la vie qu’il aimait tant. J’étais en pleine préparation pour le mondial en Espagne (1982) quand j’ai appris la nouvelle. Je me trouvais à Bordeaux. Je porte encore le choc sur moi. Et ça fait mal au cœur.
Que représente-t-il pour vous ?
Un ami de la vie, un partenaire sur le terrain. On s’entendait à merveille. Il était d’une gentillesse hors du commun. On a passé des moments extraordinaires, inoubliables, en équipe de France. On ne peut pas oublier un gars comme Jean-Pierre.
La garde noire est encore aujourd’hui dans la mémoire des amoureux de l’équipe de France (1973). C’était une belle époque, n’est-ce pas ?
Une très belle époque. Cette appellation est née après le match Pologne – France, en 1973. On avait gagné 2-0. Lors de la conférence de presse d’après-match, Stefan Kovacs (l’ancien sélectionneur des Bleus) avait répondu à une question d’un journalise en déclarant : « aujourd’hui, j’ai trouvé la garde noire ». On avait rigolé.
Quels étaient les moments forts avec lui ?
Tous les instants passés avec Jean-Pierre étaient bons à savourer. Je me souviens d’un homme adorable, joyeux. Un guerrier. Il croquait la vie. Ajaccio – Nîmes, c’était mon premier match contre lui. Je me rappelle d’une anecdote. Je me disputais un ballon avec lui, un coéquipier à moi me dit : « Chope-le ! ». Jean-Pierre avait répondu : « Pas de ça chez nous ! ». Après ce match, on s’est retrouvé en dehors du terrain. On a parlé. En équipe de France, je l’ai connu en 1972 (tournée au Brésil). Notre dernier match ensemble en équipe de France, c’était contre le Danemark.
Vous avez décidé de ne pas lui rendre visite. Pourquoi ?
Je préfère garder l’image de Jean-Pierre que j’ai connue (ému). Je n’ai jamais voulu le voir après son accident. Je veux qu’il revienne. Qu’il retrouve sa famille…